J’ai vu Delphine Coulin présenter ce livre à « La Grande Librairie », sur France 5, il y a quelques semaines. Deux filles, militaires, reviennent d’Afghanistan. Elles passent trois jours à Chypre, dans un grand hôtel de luxe. C’est le rituel de la décompression pour les militaires, après six mois de guerre. Accompagné de son lot de debriefings, afin d’exorciser au mieux ces six mois difficiles.
Je suis, pour ma part, très intrigué par le fait que des femmes s’engagent, décident de faire de la guerre leur métier. La carrière militaire, ce n’est pas forcément la guerre, me direz-vous. Certes. Mais l’Afghanistan, c’est la guerre. Il y a des femmes. Le Mali, c’est la guerre. Il y a des femmes.
Le goût de l’aventure ? L’argent ? Je n’ai pas de réponse, évidemment. Mais ce goût des armes, ce goût de la violence, me pose problème. J’ai déjà du mal à le comprendre pour un homme. Alors, pour une femme ? Et attention, si des féministes me tombent dessus, je dégaine. Sans hésiter. Car, si je prône la non-violence, je ne suis pas sûr de garder mon calme en toutes circonstances. Je vais en rajouter, histoire de me faire bien siffler : qu’y a-t-il de plus moche qu’une femme en treillis ?
Un homme en treillis.
Ouf, je m’en sors à peu près…
Revenons au bouquin. Il n’a pas été à la hauteur de mes attentes. En gros, je trouve que Delphine Coulin reste trop dans les clichés. Ça me va plutôt bien, car ça cadre parfaitement avec mes propres clichés antimilitaristes. La guerre, c’est dur, c’est injuste, c’est moche. Le soldat, quel que soit son sexe, il survit comme il peut, prêt à tout pour sauver sa peau. L’homme militaire est violent, machiste, il boit beaucoup. Son rapport aux femmes est souvent bestial. À Chypre, des militaires commettent un viol odieux.
Malheureusement, la dénonciation de l’univers de la guerre ne va guère au-delà. Mon naturel plutôt rebelle aurait préféré une plus grande révolte face à ces injustices. Delphine Coulin s’en tient à une description de l’univers de l’armée, insupportable par bien des aspects. C’est déjà pas mal, et merci à elle pour ces rappels salutaires.
Et puis, elle sait très bien parler de la peur des filles. Cette peur qui monte vers l’âge de huit-dix ans, et qui ne vous lâche plus. Cette peur qu’on explique mal aux filles, cette peur qui vous indique que, derrière une multitude de petits interdits, il y a un truc qu’on n’ose pas trop raconter, mais qui est grave, très grave.
Merci à Delphine Coulin de nous rappeler que la vie des filles, c’est pas simple !
Alors, pourquoi se la compliquer encore en enfilant le treillis, en partant à la guerre ?
Mystère…
Jean-Michel Lacroûte
Delphine Coulin, Voir du pays, Grasset édit., nov. 2013.