Depuis plusieurs années, il ose clamer, haut et fort son refus de porter l’uniforme et d’être encaserné. Il prône la non-violence, il exclut de se reconnaître dans un État quel qu’il soit, il dénonce les gouvernements guerriers incapables de respecter les êtres humains.
Se déclarer objecteur de conscience, en Turquie, comme pour beaucoup d’autres individus dans différents pays, dont les colonnes du Front ne cessent d’énumérer le nom et la peine de prison, c’est se retrouver à maintes reprises privé de liberté.
C’est risquer également d’être broyé par la machine infernale de la justice militaire, qui réprime avec férocité ceux qui disent non à un monde de fer et de sang, car ils démontrent que la paix ne peut s’obtenir que par le rejet total des armes et des uniformes.
Aujourd’hui, Mehmet Tarhan purge une peine de quatre ans de prison. Nous devons, par tous les moyens, faire en sorte que cet homme remarquable recouvre la liberté et puisse poursuivre son engagement.
PEUT-ÊTRE lisez-vous pour la première fois le nom de Mehmet ? Aussi, voici un résumé des événements. L’État turc veut bien rentrer dans la Communauté européenne, mais il refuse de reconnaître le droit absolument fondamental d’une démocratie, celui de l’objection de conscience. Sans la reconnaissance du droit au refus de tuer, que signifient les autres valeurs des droits de l’homme ?
Machine à broyer
Le 27 octobre 2001, au cours d’une conférence de presse au siège de la Ligue des droits de l’homme d’Istanbul, Mehmet Tarhan déclare publiquement son objection de conscience. Il est alors recherché par les militaires pour « appel au refus de l’armée ».
Le 5 septembre 2004, il lit en public un communiqué de presse au nom du groupe antimilitariste d’Istanbul, à l’occasion de la journée d’action « Un bol de riz pour les objecteurs de conscience et les insoumis ».
Le 8 avril 2005, Mehmet est arrêté, chez des amis, à Izmir, lors de l’organisation d’un salon du livre dans le cadre de ses activités professionnelles. Il est détenu arbitrairement jusqu’au 26 mai, où une audience de procédure militaire décidait de son maintien en prison (nous passons sur les divers mauvais traitements qu’il subira et sur les pressions exercées sur sa famille et ses proches). L’armée veut détruire cet inflexible réfractaire et va tenter, par tous les moyens, de le faire plier.
Le 10 août, la condamnation tombe : quatre ans de prison dont dix-neuf mois dans la prison militaire à Sivas.
Union pacifiste a relaté ces faits et dénoncé toutes les violations de la procédure, de l’équité et du droit (cf. numéros 427 à 431).
Face à la répression
Mehmet avait entamé une première grève de la faim, du 25 mai au 21 juin 2005, quelque temps après son arrestation. Il protestait alors contre les maltraitances commises par d’autres prisonniers et contre l’administration pénitentiaire, qui avait fait croire qu’il était un terroriste et qui avait laissé faire. Il avait cessé cette grève de la faim lorsque les autorités avaient accepté d’entendre sa demande.
Aujourd’hui, nous sommes très inquiets, car nous avons appris que Mehmet poursuit une seconde grève de la faim, depuis le
30 septembre, en raison des nouvelles agressions commises envers sa personne.
Le 30 septembre, un officier, accompagné de quatre gardiens, lui annonce qu’ils vont lui couper ses longs cheveux. Ils appellent sept personnes qui lui taillent, de force, ses cheveux ainsi que sa barbe et sa moustache. Frappé violemment à différents endroits, il souffre du visage, des deux mains, de son bras, du pied gauche, et porte diverses contusions aux bras et aux jambes.
Un compagnon de cellule, Ali, qui a voulu s’interposer, a été également victime de violences. Il a été transféré dans un hôpital universitaire, où les traces de coups ont été constatées, puis ramené en prison.
Par contre, pour Mehmet, ce sont les médecins militaires qui ont attesté qu’il ne portait aucune trace de mauvais traitement.
Depuis, tous les deux mènent une grève de la faim. Mehmet demande à être examiné par un médecin civil, pour que les faits de torture puissent être constatés.
Soutien
L’Internationale des résistants à la guerre (www.wri-irg.org) coordonne la campagne de soutien à Mehmet. Elle propose à ses différentes sections d’organiser, le 9 décembre, la veille de la Journée des droits de l’homme, des actions de protestations devant les ambassades et consulats turcs.
L’UPF s’associe pleinement à cette initiative et prépare cette journée de protestation. Pour les personnes de la région parisienne, ne pas oublier le rendez-vous du samedi 26 novembre (cf. page 14) !
Il y a aussi un modèle de lettre à envoyer au président turc, via l’ambassade de Turquie que vous trouvez dans l’UP no 431 (ou à télécharger sur notre site).
Adresser un mot de soutien à Mehmet, Sivas Military Prison, 5. piyade Egitim Tugayi, Askjeri Cezaevi, Sivas Turkey.
Des messages de protestation peuvent être également envoyés directement, en Turquie, par fax : Sivas Military Prison, 00 90 346 225 3915 - Chef du bureau, 00 90 312 425 0813 - ministre de la Défense, 00 90 312 417 6386 - bureau du président de la République, 00 90 312 427 1330, bureau du Premier ministre, 00 90 312 417 0476.
À nous de faire craquer les instances militaires, avant que ce ne soit Mehmet qui craque.
Sylvie