Ce livre de Paul Rocher* porte en sous-titre « Politique de l’arme non létale ». Depuis l’irruption des Gilets jaunes (automne 2018), il devient évident que le débat public, chez les gens qui font l’effort de chercher leurs informations, tourne autour de la question de la violence policière.
Le cinéaste David Dufresne, dont le film ne sort que dans peu de salles, a recensé deux décès, vingt-cinq éborgnés, cinq mains arrachées, sept cents blessures à la tête, sans compter les défoulements et matraquages par les forces omniprésentes dites « de l’ordre ». D’ailleurs, leurs instructions sont de tirer des balles de caoutchouc, de balancer des grenades lacrymogènes. En deux mois de répression contre les Gilets jaunes, il y a eu 9 200 tirs de LBD 40 (lanceurs de balles de défense), armes non létales (euphémisme), mais non anodines pour la santé quand on les prend dans la gueule ! Effets secondaires considérables, la nouvelle forme d’étatisme autoritaire.
Jamais sanctionnés, les policiers insultent à tour de bras les manifestants, les « fils de pute » de ces fachos pleuvent comme à Gravelotte, tant ils sont sûrs d’être couverts par les juges. En 2017, le jeune Théo a été violemment interpellé par quatre policiers, dont l’un lui a déchiré avec sa matraque la zone péri-anale sur 10 cm de long, d’où des séquelles à vie : il s’agit, clament-ils, de leur « péter les fesses ».
Le flash ball calibre 44 produit des tirs de forte détonation, efficaces et précis jusqu’à 12 m. Amnesty international alerte sur les blessures graves, voire mortelles. Les grenades de désencerclement et leurs détonations assourdissantes (lésions auditives), projettent dix-huit balles de caoutchouc avec leur bouchon contenant de la dynamite.
Les grenades GLI F4 ou GM2L, introduites en 2011, combinent effets acoustiques et cinétiques. Elles usent 25 g de TNT (conséquences psychiques, chimiques et de souffle).
Le pistolet à impulsion électrique (PIE généralisé en 1970) vise la neutralisation d’une personne par une décharge de 50 000 volts. D’où une forte douleur qui peut bloquer le système nerveux. Aujourd’hui, le Taser X26 est utilisé par les gendarmes. Le comité des droits humains de l’ONU considère ces décharges comme une forme de torture.
Les canons acoustiques, tels le GLI F4, diffusent des infrasons (basses fréquences), ultrasons (hautes fréquences), susceptibles de refouler des rassemblements à plus de 3 km.
Les armes optiques visent à aveugler « temporairement » les personnes ciblées par des flashs de lumière très clairs et stroboscopiques (d’où vomissement, désorientation, crises d’épilepsie photosensibles…)
Il ne faut pas oublier que les gaz lacrymogènes avaient déjà fait leurs preuves en 14-18, avec les aléas de la direction du vent. Les armes chimiques, avec variantes, anesthésiantes, malodorantes, soporifiques, à substances lubrifiantes ou collantes, blessent douloureusement les voies respiratoires, la peau, les yeux, et peuvent être nocives à long terme.
Militarisation du ministère
de l’Intérieur
Les premiers fusils à balles caoutchouc apparaissent en 1982 et les armes électriques dès 1990. La DGA, délégation générale à l’armement, est chargée au ministère de la Défense de trouver sur le marché des systèmes d’armes opérationnels et « acceptables » pour équiper la police.
C’est fait pour choquer, paralyser et rendre l’espace intenable, voire le contrôler en empêchant de quitter une zone.
Ces dix dernières années, la fréquence d’utilisation de toutes ces armes est phénoménale. L’argent ne manque pas pour les alimenter et renouveler. Elles sont susceptibles de causer plus de morts que les armes à feu conventionnelles.
En parallèle, la proportion des sympathisants d’extrême droite chez les policiers et gendarmes atteindrait 59 %. Ces malfaiteurs nazillons s’organisent en réseaux tels « Honneur de la police », l’association Front national police, etc.
Le ministère de la Défense a profité d’une hausse importante de ses effectifs de 1997 à 2008 : la répression violente devient une priorité politique.
L’industrie des armes a vu son CA quadrupler entre 1981 et 1995. Sa croissance annuelle avoisine les 10 %, à près de 8,37 milliards d’euros aujourd’hui.
Les salons Milipol ou Civipol relient les magouilles des sociétés de sécurité privées du maintien de l’ordre avec celles des industriels.
L’omniprésence des policiers, le nombre des gardes à vue (neuf fois plus que les incarcérations), prouvent l’acharnement du répressif, sans enquêtes sérieuses ni preuves solides. Le militantisme devient un terrorisme (anéantir toute contestation de l’autorité).
Or, comment un gouvernement peut-il violenter ainsi sa propre population ? N’est-ce pas la marque du tyran contre des électeurs mécontents ? Ne va-t-il pas perdre sa popularité ? La multiplication de photos et de vidéos sur le réseau social atteste du caractère massif des violences policières. Elles dessillent les yeux des incrédules. Par hasard, elles peuvent même attirer l’attention des journalistes et grands médias sur le comportement criminel de policiers et gendarmes.
Albert Louvrier